LES RUMEURS

On raconte qu’au Nord, on s’est trompé d’Ouest.
Certains ont crié à la perte du sens, d’autres à la perte du Nord.
Mais les fidèles rappellent qu’il vaut mieux perdre un point cardinal qu’un point-cardinal.

Les moqueurs, eux, s’orientent comme ils gouvernent : selon le vent.
Quand le Sud souffle, ils flattent le Soleil ; quand l’Est tonne, ils changent de cap.

Un vieux pèlerin aurait résumé la chose ainsi :
« En Kald, tout le monde veut montrer la voie, mais peu savent lire la rose des vents. »

Et depuis, on dit dans les auberges :

“Qu’ils rient du Nord s’ils veulent, au moins là-bas on avance.
À l’Est on s’essouffle, au Sud on s’empiffre,
et à l’Ouest… on cherche encore la droite direction.”

Les sages kaldeens auraient en effet confirmé l'adage : il vaut mieux etre seul que mal accompagné. Ils auraient aussi dit qu'il vaut mieux etre bien accompagné que seul...

Le populaire prétend, le sage ne le contredit guère, qu'il vaut mieux être seul que mal accompagné.
En d'autres termes il se dit que mieux vaut une église isolée plutôt que soutenue par de "grands seigneurs" qui ne sont "grands" que dans la flagornerie, la suffisance, la lamentation et la mesquinerie et loin d'être "seigneur", bien plus "saigneurs" ou bouchers...

On raconte que l'Eglise dirigée par Amicie perd peu a peu son autorité. Autrefois soutenue par de grands seigneurs, elle se retrouve de plus en plus isolée. Il se dit meme que peu sont les hommes qui se soucieraient de son sort. Certains vont même a dire que Kald se porterai mieux sans Amicie.

Les espions rapportent qu'aujourd'hui en Yrédia le roi et ses vassaux ont longuement discuté de géopolitique.

Le roi :
- Passez-nous le sel
Premier marquis :
- L'est où ?
Second marquis (désignant la salière) :
- L'est là !
Le roi :
- Ah non ! L'est est à droite !
Le second marquis :
- Oui votre grandeur mais votre fidèle vassal est au nord...

Il se dit que le roi a poussé un profond soupir et s'est rendormi.

On raconte que pour s’orienter, il est parfois difficile de se souvenir si par rapport au Nord, l’Ouest est à droite, ou à gauche !
Quoiqu'il faille encore savoir où situer ce fameux Nord.

Quelques petits trucs existent comme une petite interrogation: Où est l’Est ?
Où est l’Est : en prenant la première lettre de Où et de Est, on obtient la position de l’Ouest par rapport à l’Est, toujours avec le Nord en haut (tiens, un indice !).
Ouest à gauche (début de la phrase), Est à droite.
Il existe aussi d’autres mots qui font office de moyen mnémotechnique: Orange. OrangE.

On a "blaireau", aussi, mais c'est un peu plus compliqué.

On raconte que les éléphants de guerre de l’Est plient des genoux et gémissent avant même d’avoir quitté les écuries.
Les pauvres bêtes ne supporteraient plus le poids de leurs cavaliers, soldats engraissés par les banquets de Beaton et les festins de Solitor.

À ce qu’il paraît, un cornac aurait lâché, en pleurant de rire :
« Les pachydermes ne peuvent chevaucher des pachydermes ! »

Depuis, dans les casernes, on ne dit plus “monter au combat”, on dit “faire crouler la monture”.
Et dans les auberges du Nord, quand un homme boit trop et s’assied lourdement, on lui crie :
« On reconnaît les royaumes à leurs montures : certains avancent par grâce, d’autres s’effondrent sous leurs graisses. »

Une devinette circule sur les terres orientales :
Comment doit-on s'adresser au puissant souverain qui règne sur Mitsokaï, Sartar, Yrédia et dont les domaines s'étendent jusqu'en Goréhandal, Erylin et Gallica ?

- Votre Magnificence?
- Votre Majesté ?
- Votre Grâce ?

Rien de tout cela... On dit "cire" tout simplement.

Une épidimie ferait rage sur les îles, les médecins s'interrogent : comment la paranoïa est-elle devenue contagieuse ?

On rapporte, non sans effroi, que le Roi Nabucho, dit le Vil, a fait d’Apukald son jardin des perversions.

Sous prétexte d’y instruire ses pantins — de simples mannequins au départ, façonnés pour le service du royaume — il y aurait insufflé une vie trouble, née de son souffle et de sa vanité. Ces créatures, ni tout à fait humaines ni tout à fait damnées, obéissent à des ordres que nul serviteur de chair n’oserait entendre.

Le Roi, dit-on, les contemple longuement avant de leur enseigner des gestes qu’il prétend divins, mais que les prêtres qualifient d’ignobles. On dit qu’il veut ainsi goûter à sa propre perfection, se vénérant lui-même comme une idole de chair, dans une prière tournée vers le bas plutôt que vers le Ciel.

Les moines de Faldric jurent que les nuits d’Apukald résonnent encore des soupirs de ces pantins sans âme, et qu’à l’aube, le Roi sort blême, comme vidé de lui-même, laissant derrière lui le silence — et le scandale.